Michel Jullien - Intervalles de Loire

Intervalles de Loire

Michel Jullien

Editions Verdier

février 2020

128 pages

ISBN : 9782378560447

 

4ème de couverture :

Sur le pont de Nevers, trois bons amis regardent couler la Loire. Ils vont avoir cinquante ans. Ce qu’ils voient depuis le tablier : les grandes veines de courant, l’eau fendue par l’étrave des piles, les marmites tournant sur elles-mêmes sans jamais vouloir se rendre au lit, les bancs de sable, les îlots et les troncs flottés. Les fleuves et les rivières font appel à l’enfance et, avant le soir, la songerie des trois camarades prend la forme d’une boutade, c’est-à-dire d’un serment : descendre la Loire à la rame, sur une barque plate, idée potache qui les conduira à l’océan.

Ce texte de Michel Jullien nous place dans un esquif de quatre mètres carrés, pour une descente longue de huit cent cinquante kilomètres, chaque nuit à dormir d’île en île. C’est tout sauf un journal de bord ; pas de récit événementiel, une équipée sans hauts faits, rien qui ne concernât les inévitables anicroches et autres coups de théâtre de ce genre de relations, pas d’appesantissement non plus sur la richesse patrimoniale des régions traversées. Bref, l’auteur nous livre une chronique antisportive, anticulturelle, une narration dans le désordre.

Cette échappée fourmillante d’images s’attache à restituer ce qu’est la perception d’un fleuve parcouru du dedans, à hauteur de paupières. Michel Jullien s’approche au plus près d’une acuité sensuelle et traduit chaque impression physique, auditive et visuelle d’une morne récréation fluviale. Que voit-on depuis une barque, quels paysages, quels défilés, quelles contrées, quelles rencontres, quelles bourgades, toutes choses que l’on conçoit autrement depuis la rive ? Que devient une ville traversée à la rame ? Quels liens rapprochent et désunissent les mouvements du marcheur et celui du rameur, comment tournent les pensées en tirant l’aviron, de quoi parler à bord, comment s’appréhende le décor par le centre du fleuve ?

Comme souvent dans les textes de Michel Jullien, l’humour en est, qui lui permet de toucher au plus juste les perceptions sensorielles. Très vite, à chaque page, à notre tour, nous voici au bastingage, au cœur de la Loire, dans la barque même, maniant les rames, indiquant le chemin à la proue, corrigeant l’avancée depuis le gouvernail, passant des ponts, croisant des hameaux, éprouvant le temps, bâillant aux paysages, tout un projet de l’enfance tenu jusqu’à la mer.

L’auteur (site de la maison d’édition) :

Michel Jullien est né en 1962, non loin de Paris. Après des études littéraires, il enseigne à l’Université Fédérale du Para, au Brésil (Belem). De retour en France, il fait ses premières armes dans l’édition, chez Hazan, puis chez Larousse avant d’animer une maison d’édition spécialisée dans les arts décoratifs. En marge des livres, en marge de l’édition, il s’adonne à sa plus grande passion : la montagne. Après avoir gravi une centaine de sommets dans le massif du Mont-Blanc, les Écrins et les Pyrénées, il cesse l’escalade à quarante-cinq ans et se consacre à l’écriture.

=====================

Les trois rameurs sont les besogneux, la Loire est la vedette.

Un arrêt sur le pont de Loire à Nevers entre amis peut changer un moment de vie, tout comme fêter ses cinquante ans de façon bien arrosée.

Ils sont trois amis et, après (ou pendant) les libations lancent cette proposition « descendre la Loire en barque » Ben oui, pourquoi pas et le lendemain l’un d’eux ressort la proposition… c’est l’engrenage, surtout lorsqu’ils dénichent sur le Bon Coin une annonce « Vend barque ». Une grosse barque en alu à fond plat. Pour eux trois, cela devrait aller. « une ancienne barge de pompiers, une grosse ferraille rouge et piquée (peut-être moins rouge qu’entièrement rouillée), un parallélépipède évasant dénué de fuselage, fond plat, carène épaisse, des plats-bords ourlés, lippus, quelque chose d'immaniable, long de sept mètres pour deux de large, deux cents kilos à l'oeil, poids net. »

Et vogue la galère, pardon la barque ! Elle a un prénom « Nénette »

Les trois copains débutent leur périple à Andrézieux. Plus en amont, les dimensions de l’embarcation n’autorisent pas la navigation.

Le livre n’est pas un carnet de bord, mais les impressions de l’auteur, « à hauteur de paupières », à hauteur de sensations.

Michel Jullien m’épargne les descriptions cartes postales tout comme les bruits de son nombril.Tout n’est que sensations visuelles, auditives, olfactives. Oui, la Loire a une odeur (je suis assez souvent à son bord des heures à traquer oiseaux et autres libellules) une odeur sucrée de vase, poissons, limon et essences végétales diverses - quoi, ça pue !! mais non, c’est une sensation délicieuse, vous y êtes et ça se sent !

« La barque évolue dans une espère de silence engorgé de bruits, entendus de loin, à l’écho, des bruits dont on ne voit pas l’émission, l’origine » et puis, il y a le clapotis sur la coque ; le couinement des rames dans leurs dames de nage empêche de l’entendre, mais lorsqu’ils ne rament pas, ils perçoivent « un gargouillis de haute-contre… quelque chose de fin, posté entre le fredon et le cliquetis » Des fois, l’embarcation « froufroute de la coque » lorsqu’elle touche un haut-fond.

La Loire, tout comme l’Allier n’est pas si dolente qu’elle y paraît avec ses tourbillons, le passage des ponts, les hauts-fonds.

Pour dormir, il dégotte un îlot où, la nuit, les coassements des grenouilles et autres crapauds ne sont pas qu’un petit bruit de fond agréable.

Les trois rameurs sont les besogneux, la Loire est la vedette.

Qu’est-ce que j’ai aimé ce voyage sur la Loire. Rien de sensationnel, mais il faut le faire. Les sensations que Michel Jullien décrit avec un vocabulaire imagé sont emplies de poésie. C’est également une échappée littéraire car la Loire a connu moult grands écrivaines et écrivains que l’auteur insère dans le paysage tels Madame de Sévigné, Jules Renard, Paul Valéry… sans que ce soit redondant.

La Loire, fleuve royal et majestueux (n’oublions pas l’Allier!!), vivant, habité, Michel Jullien un auteur au talent certain, tout ceci en fait une très belle lecture.

Un bonheur de lecture où l'humour pointe le but de son sourire

J'en fais un coup de coeur

 

 

 

 

 

 

 

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
V
Je ne connais pas mais j'imagine facilement que tu as pu aimer...
Répondre
Z
Attachement régional oblige, mais j'ai apprécié l'écriture et le style
A
Quelle drôle d'idée de départ.
Répondre
Z
Les aventures ont souvent un départ farfelu genre et si....
M
Une belle aventure qui doit être riche en évocations et sensations de toutes sortes :) Une belle façon de voyager sans doute...et avec humour en plus, à voir donc, j'ai une telle pile en attente que ce ne sera pas ma priorité mais je comprends ton plaisir de lecture
Répondre
Z
Ah, nos piles à lire, chez moi, c'est une bibliothèque à lire, c'est te dire !!
Personnaly © 2014 -  Hébergé par Overblog