Antoine Wauters - Mahmoud ou la montée des eaux

Mahmoud ou la montée des eaux

Antoine Wauters

Editions Verdier

144 pages

août 2021

ISBN : 978-2-37856-112-3

 

4ème de couverture :

Syrie. Un vieil homme rame à bord d’une barque, seul au milieu d’une immense étendue d’eau. En dessous de lui, sa maison d’enfance, engloutie par le lac el-Assad, né de la construction du barrage de Tabqa, en 1973.

Fermant les yeux sur la guerre qui gronde, muni d’un masque et d’un tuba, il plonge – et c’est sa vie entière qu’il revoit, ses enfants au temps où ils n’étaient pas encore partis se battre, Sarah, sa femme folle amoureuse de poésie, la prison, son premier amour, sa soif de liberté.

Cet ouvrage a reçu le prix Wepler – Fondation La Poste, le prix Marguerite-Duras, le prix des lecteurs de la Librairie Nouvelle à Voiron et le prix de la Librairie Nouvelle d’Orléans.

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« Au début, les premières secondes, je touche

toujours mon cœur pour vérifier qu’il bat.

Car j’ai le sentiment de mourir.

J’ajuste mon masque, me tenant à la proue.

Je fais des battements de jambes. »

Chaque jour Mahmoud Elmachi plonge pour retrouver son enfance, son village disparu, englouti par les eaux du lac el-Assad, résultante de la construction du barrage sur l’Euphrate à Tabqa, dans les années 70 par Hafez El Assad père de l’actuel président.

« Qui le croirait, hein ?

Qui croirait que sous cette barque se trouvent

la vaisselle ancienne, nos tables, nos lits, ainsi que

la petite ardoise encadrée de bois laqué où j’écrivais mes

premiers mots, quand rien n’était encore perdu et tout

semblait possible ? Qui croirait que ce village, bien avant

nous, fut l’une des premières cités de l’histoire ?

Qui croirait ton vieil Elmachi, Sarah ? »

Maintenant, c’est le fils, dit « ophtalmologiste » qui gouverne le pays et le met à feu et à sang, surtout depuis le printemps arabe où se sont perdus ses deux fils et sa fille. Maintenant, il est vieux et malade. Sa femme Sarah est une sage. Elle l’écoute et Antoine Wauters lui donne la parole dans deux chapitres.

Lorsqu’il plonge, il palme, « je palme lentement pour maintenir mon corps d’aplomb ».

Mahmoud est malade, son cancer progresse. Il revoit sa vie d’avant, avant la création de ce lac, avant la mort de Leïla sa première femme tant aimée, avant la disparition de ses trois enfants et, pour la dernière plongée, Sarah.

« Mon grain de beauté me fait mal, mais je ne suis

plus dans la lassitude des choses, ici.

Je suis bien.

Ce n’est pas une distance physique. C’est du temps.

Je rejoins ce qui s’est perdu. Je rejoins le temps perdu »

Mahmoud est poète et se sert des mots pour narrer la Syrie de l’ophtalmologiste. Au milieu de l’eau, peut-être que tout cela devient supportable, peut-être car la réalité se raccroche à son passé. « Une barque à mi-chemin entre les mondes » Et puis, il y a la peur de la catastrophe imminente, le barrage est la proie de dures batailles et pourrait sauter, une nouvelle catastrophe écologique et humaine.

Chant, ode à l’amour mais également oraison funèbre aux victimes du régime syrien. Quelle écriture, quel très beau texte, quelle humanité. Ce livre, écrit en vers libres avec juste les mots nécessaires pose la poésie contre la barbarie. Les mots de l’amour, du souvenir, de la vie contre les maux de la violence.

Grand coup de cœur

 

 

 

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A
Un récit hors-norme que je viens de finir et que j'ai beaucoup aimé.
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Z
Hors normes et si beau
A
L'auteur était à la radio la semaine dernière ; j'ai aimé ce qu'il disait de son livre (je ne sais plus dans quelle émission.
Répondre
Z
Je l'ai écouté sur France Inter avec Trapenard
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