Julie Otsuka - La ligne de nage

La ligne de nage

Julie Otsuka

Traduction Carine Chichereau

Editions Gallimard

Août 2022

176 pages

ISBN : 978207295858

 

4ème de couverture :

Nageurs et nageuses de cette piscine que tous appellent « là en bas » ne se connaissent qu’à travers leurs routines et petites manies, et les longueurs, encore, encore. Ils y viennent à heure fixe pour se libérer des fardeaux de « là-haut ».

Alice, tout spécialement, trouve un grand réconfort dans sa ligne de nage. Et puis un jour, une fissure apparaît au fond, dans le grand bain, en préfigurant d’autres, celles de son cerveau. Pour elle, l’inéluctable fermeture résonne comme un clap de fin. Remontent alors à la surface des souvenirs de jadis, de l’internement dans un camp pour Nippo-Américains pendant la Seconde Guerre mondiale, d’une enfant perdue très tôt, pourtant si parfaite… Mais Alice oublie chaque jour un peu plus.

Là où il faudra bien se résoudre à l’enfermer, sa fille essaie de sauver quelques lambeaux du paysage fracturé qu’est devenue leur relation lacunaire.

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« La piscine est profondément enfoncée sous terre, dans un vaste espace caverneux à plusieurs mètres sous les rues de notre ville »

C’est ici que se retrouve une communauté de nageurs qui vient chercher, dans l’effort, une pause dans le fracas du dessus. Ils sont autres « là en bas, à la piscine, nous n’appartenons plus qu’à l’une de ces trois catégories : les rapide, les moyens et les lents. »

« Au début, on la voit à peine, petite ligne sombre juste au sud de la bonde dans le grand bain, ligne quatre. » LA fissure, celle qui inquiète, qui fait peur, qui modifie, par sa présence, le quotidien des nageurs. Une autre apparaît, les nageurs fuient un à un. Alice, lorsqu’elle sort de l’eau oublie « Une fissure ? Mais il n’y a pas de fissure ». Les experts discutent, ergotent jusqu’à la décision finale : fermeture de la piscine. D’ici là, les nageurs, enfin ce qui en reste, sont devenus un petit cercle, la tolérance, la gentillesse, la fin de l’anonymat arrivent. Ils lui donnent même un nom « la nouvelle gentillesse » « Parce qu’à présent, nous sommes tous égaux devant l’issue commune.

Second acte et changement de décor. Plus de piscine, mais Alice dont la mémoire se fendille comme la piscine. « Elle a oublié comment elle s’est fait ces bleus sur les bras, et puis qu’elle est allée se promener avec toi un peu pus tôt dans la matinée »

Alice tombe doucement dans une maladie neurodégénérative, peut-être Alzheimer. Tant qu’elle le peut, la famille la maintient à domicile.

Troisième acte, Belavista.

« Vous êtes là aujourd’hui parce que vous avez échoué aux tests »

Le temps est, hélas, venu de la placer (j’ai horreur de ce mot dans ce contexte, mais c’est celui qui est usité). La voici à Belavista qui se dépeint comme « une résidence privée, spécialisée dans les troubles de la mémoire ». Derrière le papier glacé de la brochure ce cache un lieu où « hélas, la fête est finie », elle doit rester dans sa ligne de nage.

« Si vous ne voulez pas vous montrer docile, nous seront obligés de vous administrer un sédatif. Si vous résistez au programme de soins prévus, nous serons obligés de vous administrer un sédatif. Si vous refusez de prendre votre sédatif, nous serons obligés de vous administrer un sédatif encore plus puissant, voire, en fonction de votre degré d’obstination, de vous faire une injection ». Quel joyeux programme !!!

La famille, ici la fille et le père vont avec et les souvenirs refont surface. Tous ces signes qu’ils n’ont pas voulu voir tel le pot de crème pour le visage dans le congélateur. Le père retire tous les post-il collés dans toute la maison : « elle ne rentrera plus à la maison »

Julie Otsuka parle avec beaucoup de délicatesse des fissures dans la mémoire d’Alice à mettre en regard avec la première fissure de la piscine suivie des nouvelles et de la fermeture de l’établissement. Maintenant les fissures d’Alice font qu’elle n’habite plus sa maison avec son mari et que l’établissement dans lequel elle vit désormais ressemble à un internat très strict pour ne pas employer le mot prison.

Un livre délicat

 

 

 


 

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V
Il me tente depuis sa sortie ! Tu confirmes :) En plus, il est dispo à ma BM, mais qu'est-ce que j'attends??
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Z
Allez cours y vite !!
M
Je l'ai noté pour le lire mais pas encore emprunté, vu la pile qui m'attend à la maison. J'avais beaucoup aimé de cet auteur "Certaines n'avaient jamais vu la mer". Merci pour ta chronique
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Z
Je n'ai pas lu son roman précédent. Je risque de le demander à la bibi pour une lecture dans quelques mois
A
Une lecture qui me tente de plus en plus.
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Z
J'ai aimé le parallèle entre la fissure dans la piscine et la fissure dans le cerveau de la vieille personne
P
J'ai ce livre dans ma PAL depuis septembre et je compte bien m'y atteler prochainement..bises et belle semaine
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Z
Belle lecture à toi
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