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Toni Morrison

Editions Christian Bourgeois

Traduction Christine Laferrière

Août 2012

155 pages

ISBN : 9782267023831

 

 

4ème de couverture :

Toni Morrison nous plonge dans l'Amérique des années 1950.

« Home est un roman tout en retenue. Magistral. [...] Écrit dans un style percutant, il est d'une simplicité trompeuse. Ce conte au calme terrifiant regroupe tous les thèmes les plus explosifs que Morrison a déjà explorés. Elle n'a jamais fait preuve d'autant de concision. C'est pourtant dans cette concision qu'elle démontre toute l'étendue et la force de son écriture. »
The Washington Post

« Ce petit roman envoûtant est une sorte de pierre de Rosette de l'œuvre de Toni Morrison. Il contient en essence tous les thèmes qui ont toujours alimenté son écriture. [...] Home est empreint d'une petite musique feutrée semblable à celle d'un quatuor, l'accord parfait entre pur naturalisme et fable. [...] Mme Morrison adopte un style tranchant qui lui permet de mettre en mots la vie quotidienne de ses personnages avec une précision poétique. »
The New York Times

 

Quelques mots sur l’auteur (source Wikipedia):

Toni Morrison (de son vrai nom Chloe Anthony Wofford) est née le 18 février 1931 à Lorain en Ohio. Romancière, professeur de littérature et éditrice américaine, elle est lauréate du Prix Pulitzer en 1988, et du prix Nobel de littérature en 1993. Elle est la huitième femme et le seul auteur afro-américain à avoir reçu cette distinction.

C’est le roman Beloved, dont l'édition française remonte à 1989, qui a fait connaître Toni Morrison en France. Mais sa notoriété américaine était venue dix ans plus tôt, coup sur coup, en l'espace de deux romans : Sula (1973) et Song of Solomon (1977).

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En italique, les premières pages semblent sortir d’un cauchemar ; un être humain est enterré comme une bête dans un trou creusé dans un champ à la tombée du jour «Sans jamais lever la tête, juste en regardant à travers l'herbe, on les a vus tirer un corps d'une brouette et le balancer dans une fosse qui attendait déjà. Un pied dépassait du bord et tremblait, comme s'il pouvait sortir, comme si, en faisant un petit effort, il pouvait surgir de la terre qui se déversait.». Pourquoi ces pages ? Est-ce pour corroborer la mise en asile psychiatrique de Franck victime d’hallucinations ? Il me faudra attendre la fin du live que je saurai. Ces premières pages me feront appréhender d’une façon un peu différente le livre de Toni Morrison.

Balade et ballade américaines dans les années 1950. Balade qui n’a rien de romantique. Les nègres ont été « considérés » tant qu’ils servaient de chair à canons aux avant-postes. Ils sont peu nombreux à rentrer au pays, à avoir sauvé leur peau. Franck porte en lui ce sentiment de culpabilité qui fait qu’il n’ose retourner dans son village ; ses deux meilleurs potes sont restés en Corée, morts pour la patrie. Que lui réserve-t-on ? Une chambre en hôpital psychiatrique, assommé par les neuroleptiques. Quand il reçoit ce message, « Venez vite. Elle mourra si vous tardez » il décide de se sauver. Il tambourinera à la porte du presbytère de l’église épiscopale méthodiste africaine de Sion. A partir de ce moment, une chaîne humaine se met en branle qui lui permettra d’arriver jusqu’à sa petite sœur Cee. Les démons, les cauchemars sont là qui le hantent, annihilés par les bouteilles de whisky. Il trouvera la force d’aller au secours de sa sœur et trouver sa rédemption.

Nous découvrons la vie dure d’esclave des parents de Franck et Cee qui font qu’ils ne peuvent ou ne savent donner l’amour tant ils sont crevés. La grand-marâtre et sa haine les élève. Pauvre gamins, ils ont connu la haine bien jeune. Heureusement les deux enfants sont soudés et se soutiennent mutuellement.

Il y a des moments très durs dans ce livre « Mais avant cela, avant la mort de ses gars, il avait été témoin de l’autre. Celle de l’enfant venue fouiller dans les ordures, agrippant une orange, qui avait souri, puis dit « miam-miam » avant que le soldat ne lui fasse sauter la cervelle ». Plus tard, Franck nous éclairera et c’est encore plus douloureux.

Pas beaucoup de bonheur à quoi se raccrocher. Il y a les femmes, Franck en parle avec tant de douceur «... je n’ai eu que deux régulières. J’aimais bien la petite chose fragile à l’intérieur de chacune d’elles. » Ou « Elle avait quelque chose qui m’a stupéfait, qui m’a donné envie d’être assez bien pour elle »

La trame est simple, mais la vie des noirs dans les années 50-60 ne l’était pas. Ce bouquin est d’une grand densité, pas de remplissage inutile, elle va droit au but. Pas de grandes descriptions, et pourtant tout est dit. La restitution du sud des USA de cette époque est là devant nos yeux. Les humiliations, la peur, la haine raciale, oui, tout est là.

C’est le premier Toni Morrison que je lis, grâce aux avis de mes copinautes. C’est un vrai coup de cœur. Je pense que je vais remonter le courant de ses livres et découvrir ces ouvrages précédents.

 

« Cette maison est étrange.
Ses ombres mentent.
Dites, expliquez-moi pourquoi sa serrure
correspond-elle à ma clé ? »

Sans jamais lever la tête, juste en regardant à travers l’herbe, on les a vus tirer un corps d’une brouette et le balancer dans la fosse qui attendait déjà. Un pied dépassait du bord et tremblait, comme s’il pouvait sortir, comme si, en faisant un petit effort, il pouvait surgir de la terre que se déversait

Honnêtement, à part celles que j’ai réussi à me faire à Lotus et quelques filles des rues dans le Kentucky, je n’ai eu que deux régulières. J’ aimais bien la petite chose fragile à l’intérieur de chacune d’elles. Quelles qu’aient été leur personnalité, leur intelligence ou leur allure, chacune avait en elle quelque chose de moelleux. Comme un bréchet, cet os formé et choisi pour qu’on fasse un vœu.

Aucun des biens transmis par le présent acte ne devra jamais être utilisé ni occupé par aucun Israélite ni aucun individu de race éthiopienne, malaise ni asiatique, à l’unique exception des employés de maison.

Le malheur ne s’annonce pas. C’est pour ça qu’il faut que tu restes éveillée, sinon il franchit ta porte, c’est tout.

Désignée très tôt par Lenore –la seule dont l’opinion importait à ses parents– comme « enfant du ruisseau » rebutant et à peine tolérée, Cee avait consenti à cette étiquette et se croyait sans valeur, exactement comme l’avait Mlle Ethel. Ida ne disait jamais : « Tu es mon enfant. Je suis folle de toi. Tu n’es pas née dans le ruisseau. Ru es née dans mes bras. Viens ici que je te fasse un câlin ». A défaut de sa mère, quelqu’un, quelque part, aurait dû dire ces mots et les penser.

Je suis resté un long moment à contempler cet arbre.
Il avait l’air tellement fort
Tellement beau.
Blessé pile en son milieu
Mais vivant et bien portant.
Cee m’a touché l’épaule
Légèrement.
Franck ?
Oui ?
Viens, mon frère. On rentre à la maison

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Y
Ce fut aussi mon premier Toni Morrison, mais je suis resté à l'extérieur, je n'ai pas bien compris l'histoire ni n'ai adhéré à l'écriture.
Répondre
Z
Ce sont des choses qui arrivent et c'est un peu énervant quand la majorité aime
A
Une lecture dont je garde un souvenir ému.
Répondre
S
Tu sais je crois que les avis son unanimes sur Home, visiblement Morisson a réussi une prouesse magistrale. Mais je sens quand même dans ton billet que c'est aussi une lecture dure et éprouvante. Je l'ai en projet bien sûr....
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Z
Ah, je n'ai pas trouvé que c'était une lecture dure. Le sujet est dur, mais Morrison est parfaite ici
P
C'est un livre qui m'a marquée, un de ceux que je garde près de moi, au cas où ! bisous
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Z
Je te comprends
J
Un excellent Morrison, comme presque toute sa production d'ailleurs.
Répondre
Z
Il me reste à découvrir les autres
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