Hubert Haddad - Palestine

  • zazy

Palestine

Hubert Haddad

Editions Zulma

160 pages
23/08/07

ISBN 978-2-84304-421-2

 

4ème de couverture :

Quelque part en Cisjordanie, entre la Ligne verte et la « ceinture de sécurité », une patrouille israélienne est assaillie par un commando palestinien. Un soldat tombe sous le feu, un autre est enlevé par le commando bientôt en pleine déroute… Blessé, sous le choc, l’otage perd tout repère, en oublie son nom. C’est, pour lui, la traversée du miroir.
Seul survivant, sans papiers, en vêtements civils et keffieh, le jeune homme est recueilli, soigné puis adopté par deux Palestiniennes. Il sera désormais Nessim, frère de Falastìn, étudiante anorexique, et fils d’Asmahane, veuve aveugle d’un responsable politique abattu dans une embuscade.
C’est ainsi que Nessim découvre et subit les souffrances et tensions d’une Cisjordanie occupée...

Dans ce bouleversant roman, Hubert Haddad transfigure avec Falastìn — moderne Antigone — toute l’horreur du conflit en une tragédie emblématique d’une grande beauté.

==========

 

Qu’est-ce qui différencie Cham le soldat israélien et Nessim le palestinien ? A priori tout les oppose. Hubert Haddad, nous offre, par un jeu de miroir saisissant l’antagonisme des deux parties.

Cham, soldat israélien, victime d’un rapt est devenu amnésique. Un vieux ferrailleur palestinien, le prenant pour l’un des siens, le conduit mourant dans la maison d’une veuve aveugle Asmahane et de sa fille Falastin. Sans papier sur lui, il devient Nessim, le frère disparu. Cham-Nessim sans mémoire antérieure, va vivre de l’intérieur l’occupation israélienne et tomber amoureux de Falastin (d’où le rapport avec Antigone). Il entrera dans un réseau terroriste pour terminer en bombe humaine en Israël sous la nouvelle identité de Cham auquel il ressemble étrangement (tiens donc !!) Haddad nous décrit un des chemins menant vers le terrorisme, vers la bombe humaine par trop de souffrance devant la mort d’un amour, la mort d’une famille, la mort inutile et lâche.

Ces deux populations sont si proches morphologiquement que l’un prend l’identité de l’autre sans aucun problème. Cham parle l’arabe en plus de l’hébreu, physiquement très proche de Nessim, cela facilite les choses.

Sans trancher, Hubert Haddad nous promène de part et autre de la frontière, du côté des assaillants comme du côté des assaillis ou l’inverse. Les salauds, les va-t-en-guerre, les pacifistes, la misère, la peur, la haine, l’amour sont dans les deux camps. Hélas, ce sont les extrémistes qui gagnent. Sans souvenirs de sa réelle identité, Cham-Nessim rompt le pain donné par un jeune palestiniens infirme suite à sévices (p91) n’est-ce pas une belle image ?

Palestine est un livre puissant, ce jeu de miroir est fascinant. La pression augmente doucement mais sûrement vers un choix draconien, L’engagement y est toujours présent. Le style d’Hubert Haddad, que j’avais découvert dans le peintre d’éventail, très poétique et réaliste en fait roman prenant, un régal de lecture.

En conclusion, la religion fanatisée ne mène qu’à la désolation. Israéliens et palestiniens devraient penser plus souvent au tombeau des Patriarches où se trouvent une mosquée et une synagogue.

Ils ont également lu ce livre : yv - Mimi - Sylire -

Quelques extraits :

 

Dans l’incertitude de l’aurore, un soudain vacarme la tira des abysses. Falastin courut jusqu’aux volets qu’elle repoussa des deux bras. Les toits et les terrasses reflétaient un ciel de marbre veiné de mauve à l’horizon. Des chocs violents, suivis d’une sourde déflagration, ébranlèrent l’immeuble. Elle eut juste le temps d’apercevoir les jeeps blindées des services spéciaux et de la police des douanes.

 

Le major Mazeltof ralentit à proximité du Tombeau des Patriarches. Des soldats en arme patrouillaient le long des murailles.

C’est amusant, dit-il avec un entrain joué. Vous, les musulmans et nous, juifs, nous ne parvenons à être d’accord que sur les fables. Voilà bien le seul endroit au monde où on trouve une synagogue et une mosquée sous le même toit. Vous croyez vraiment qu’Adam et Eve, Abraham et les autres soient inhumés là-dedans ?

 

Aimer, aimer ? balbutia-telle au sortir d’une rêverie amère. Aimer n’est-ce pas mourir ?

 

L’idée, c’est de se faire éclater dans un bus ou dans un marché, poursuivit Omar. Je sais où trouver les ceintures d’explosifs. Il ne faut pas regretter cette vie d’opprimé. Plus tu fais de morts chez les sionistes, plus tu montes vite au paradis : c’est comme un carburant/

Le Shadid se purifie dans le sang de ses ennemis…

 

A quoi bon ? poursuivit Nessim d’une voix blanche. Nous sommes bannis de chez nous, délogés, dépossédés, tous captifs. Partout des murs dressés, des barrages, des routes de détournement. Est-ce qu’on peut vivre comme ça, parqués dans les enclos et les cages d’une ménagerie ? Veut-on nous pousser au suicide, à la dévastation ? Je hais notre sort, je les déteste tous à en perdre l’esprit…

 

La haine est une autre chaîne, sais-tu ? Leurs rabbins ont une phrase très forte à ce sujet : « sois plutôt le maudit que celui qui maudit »

 

- Un jour la paix viendra et nous pourrons tous nous aimer, répondit-elle sur le ton languide qui précède l’endormissement. Oui, c’est seulement par la paix que nous pourrons vaincre…

- La paix ? C’est le droit du plus fort ! Ces gens-là nous infligent leur paix d’envahisseur avec des barbelés et des tanks, en détruisant les villages et les oliveraies.

- C’est que les vieux aux commandes crèvent de peur et ne jurent que par la force. La plupart ont débarqué d’Europe ou d’ailleurs avec de méchants oups bruns à leurs trousses. Ils règlent leurs comptes à travers nous. Nous sommes un peu leur miroir…

 

 

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
S
Oui, un livre très intéressant. Merci pour le lien !
Répondre
Z
c'est vraiment un bel auteur
Y
Un bouquin que j'ai adoré comme d'ailleurs souvent ceux de l'auteur
Répondre
Z
J'ai dans ma PAL Opium pappy (je crois)
D
depuis quelque temps, je fuis tous ces livres qui traitent de la palestine, d'israel, de ces conflits qui n'en finissent pas. Je les fuis parce que j'ai la sensation que tous ont raison et qu'il n'y a pas de solution. Une cicatrice trop ancienne entre deux parties qui ne sont plus reconciliables.
Répondre
Z
Je suis un peu d'accord avec toi, mais étant tombée sous le charme du peintre d'éventail, je voulais découvrir d'autres livres
A
Ça va mieux aujourd'hui on dirait, je ne sais pas ce qui s'est passé hier ! J'ai lu un recueil de nouvelles de l'auteur et j'ai beaucoup aimé son écriture, je ne demande qu'à lire autre chose, pourquoi pas celui-ci.
Répondre
Z
Tu peux sans remord
Personnaly © 2014 -  Hébergé par Overblog