Pierre Lemaître - Au revoir là-haut

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Au revoir là-haut

Pierre Lemaître

Editions Albin Michel

ISBN : 9782226249678

 

 

4ème de couverture :

Sur les ruines du plus grand carnage du XXe siècle, deux rescapés des tranchées, passablement abîmés, prennent leur revanche en réalisant une escroquerie aussi spectaculaire qu'amorale. Des sentiers de la gloire à la subversion de la patrie victorieuse, ils vont découvrir que la France ne plaisante pas avec ses morts...
Fresque d'une rare cruauté, remarquable par son architecture et sa puissance d'évocation, «Au revoir là-haut" est le grand roman de l'après-guerre de 14, de l'illusion de l'armistice, de l'Etat qui glorifie ses disparus et se débarrasse de vivants trop encombrants, de l'abomination érigée en vertu.
Dans l'atmosphère crépusculaire des lendemains qui déchantent, peuplée de misérables pantins et de lâches reçus en héros, Pierre Lemaitre compose la grande tragédie de cette génération perdue avec un talent et une maîtrise impressionnants

 

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Quelle connerie la guerre ! Cela emplit d’orgueil mal placé le lieutenant Pradelle, qui veut avoir sa Victoire. Il lancera un assaut meurtrier et suicidaire quelques jours avant l’armistice de 1918. Que, pour cela, il tue deux soldats, en enterre vivant un troisième, pas de problème pour lui, vu la quantité de soldats tués, on ne fera pas la fine bouche ni une enquête, de toute façon, celui qui a tout deviné est sous terre, enterré par une mine. Celui qui est dessous ? Albert, modeste comptable qui dit adieu à sa belle « Alors au revoir, au revoir là-haut ma Cécile, dans longtemps ».

 

Lemaitre ironise et se fait poète alors qu’Albert se meure deux pieds sous terre et que moi, « pôvre » lectrice claustrophobe suffoque !! Il se permet même de lui donner quelques conseils, peut-être qu’il attend un merci de la part d’Albert qui, de plus, se trouve nez-à-museau avec une tête de cheval. Mais, où va-t-il chercher tout cela ?

 

Arrive Zorro enfin Edouard Péricourt, beau jeune homme de bonne famille, artiste, homosexuel Qui se dit chanceux ; il a dû oublier son fer à cheval car, la grenade qui a enseveli Albert, le défigure, mais son courage ne fait qu’un tour et…..

 

Quelques pages plus loin, ce Cher lieutenant Pradelle, pardon D’Aulnay-Pradelle, rendu à la vie civile et bien en place dans les ministères, monte une affaire juteuse de cercueil. Il faut bien les déterrer puis leur donner une vrai sépulture, dans un vrai cimetière à tous ces soldats tombés au champ d’honneur. Pas de problème, Chinetoques, sénégalais et autres « classes supérieures » s’occuperont de pelleter pour sortir les corps des charniers, qu’ils soient français ou allemand, pas de problème pourvu que la famille ait un nom sur la croix ! Quoi, des cercueils trop petits ??? et oui, mon brave, y a pas de petites économies, ce Cher lieutenant Pradelle a un château à restaurer.

 

Edouard, rescapé du chaos, mais gueule cassée inapte à la vie civile décide une arnaque très audacieuse. Pour commémorer le culte des poilus morts pour la France, fin dessinateur, il proposera aux municipalités un catalogue de statues et autres monuments aux morts à des prix plus que corrects grâce aux ristournes offertes. De le belle ouvrage, du bel art….. mais sur papier, parce que pour la réalisation…. Bien sûr, défiguré comme il est, il ne sort pas et c’est avec la complicité d’une certaine personne, qui a pris soin de lui depuis qu’il est une « gueule cassée », que tout ceci peut se faire.

 

La France victorieuse glorifie ses morts et oublie ses survivants. Oui, les éclopés, les gueules cassées, on ne veut plus les voir, ils deviennent un poids pour la société qui veut aller de l’avant. Ils leur restent les sous-emplois d’homme sandwich, liftier, garçon de courses (difficile avec une jambe en moins !). Mince alors, il faut que les affaires reprennent et dans ce monde chaotique, tout est possible.

 

Pierre Lemaitre maîtrise son sujet et je n’ai pas pu faire autrement que lire, tourner les pages, lire, lire jusqu’à la fin. Son phrasé avec beaucoup de virgules est très dynamique, le vocabulaire adapté à chacun. L’auteur ne m’a guère laissé de repos (et bien oui, le fameux repos du guerrier !). De rebondissement en rebondissement, je fus souvent désarçonnée, les sentiers ne sont pas balisés et boueux ; l’imprévu est au menu ainsi que les nuits blanches.

Sur un fond historique et profondément humain, le suspens est omniprésent. Bien sûr, le méchant est beau, intelligent et fait partie de la Haute…. L’exécutant n’est pas très malin et n’est qu’un besogneux, mais, tel est pris qui croyait prendre, la morale de ce livre, c’est qu’il n’y a plus de morale pour paraphraser une célèbre chanson.

 

Ce  livre caustique sur une guerre vaine et inutile, sur l’Etat peu regardant, sur la Morale, sur l’enfer vécu par les poilus est un vrai régal de lecture

 

Livre reçu grâce à l'opération "Coup de cœur des lecteurs"  sur en partenariat avec la librairie Decitre et les éditions Albin Michel. Je les remercie pour cette lecture surprenante et prenante.

 

Quelques extraits :

Au fond, Albert s’est engagé dans une guerre stendhalienne et il s’est retrouvé dans une tuerie prosaïque et barbare qui a provoqué mille morts par jour pendant cinquante mois.

 

A la première accalmie, des rats gros comme des lièvres cavalent avec sauvagerie d’un cadavre à l’autre pour disputer aux mouches les restes que les vers ont déjà entamés.

 

Il s’arrête un instant sur ce triste constat : les Boches, depuis plus de quatre ans qu’ils essayent, n’ont pas réussi à le tuer et c’est un officier français qui va le faire. Merde. »

 

« Et là, à la place du ciel, une dizaine de mètres au-dessus de lui, il voit se dérouler, presque au ralenti, une immense vague de terre brune dont la crête mouvante et sinueuse ploie lentement dabs sa direction et s’apprête à descendre vers lui pour l’enlacer. Une pluie claire, presque paresseuse, de cailloux, de mottes de terre, de débris de toutes sortes annonce son arrivée imminente. »

 

Le général Morieux semblait extrêmement âgé et ressemblait à n’importe quel de ces vieillards qui avaient envoyé à la mort les générations entières de leurs fils et de leurs petits-fils. Fusionnez les portraits de Joffre et de Pétain avec ceux de Nivelle, Gallieni et de Ludendorff, vous avez Morieux, des bacchantes de phoque sous des yeux chassieux noyés dans un teint rougeâtre, des rides profondes et un sens inné de son importance.

 

Edouard Péricourt vient de mourir pour la France. Et Eugène Larivière, ressuscité des morts, a désormais une longue vie devant lui pour s’en souvenir.

 

Certes, la guerre avait été meurtrière au-delà de l’imaginable, mais si on regardait le bon côté des choses, elle avait permis aussi de grandes avancées en matière de chirurgie maxillofaciale

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P
Un vrai régal? Eh bien, non, pas pour moi. Je viens de le terminer et je dis &quot;Ouf&quot;. J'ai trouvé ça très long. J'aurais pu apprécier le récit avec 2-300 pages en moins mais là, non, j'ai vraiment trouvé ça tiré en longueur. La lassitude s'est vite installée pour disparaitre à la fin du roman. J'avais hâte de lire si le fameux Pradelle allait être puni comme il le méritait.<br /> Bon weekend.
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Z
Ouf, enfin un avis fort contrasté.
S
Je l'ai eu à Noël et vu tout le bien que j'en entends, je me réjouis d'avance....merci de ta participation
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Z
Un superbe livre
P
Encore un auteur que je dois découvrir...<br /> Ah lala! toujours le manque de temps!
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Z
Oui, mais la lecture c'est si bon
P
Je suis en train de le lire et j'y retourne de suite tellement c'est prenant.... Je reviendrai sur ton blog plus tard !
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Z
Tu as raison, très prenant, cela m'a valu, une fois de plus, des nuits écourtées
A
Même si le sujet ne me tente pas, j'adore l'auteur, alors je le lirais.
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Z
Je te comprends. Je vais reprendre robe de marié
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