Rugène Ebodé - Brûlant était le regard de Picasso
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Brûlant était le regard de Picasso
256 pages,
Décembre 2020
ISBN : 9782072914850
4ème de couverture :
À quatre-vingts ans passés, Mado, née d’un père suédois et d’une mère camerounaise, vit à Perpignan et se souvient : de son enfance à Edéa, au Cameroun, sur les bords de Rivière blanche et rouge, avant que n’éclate la deuxième guerre mondiale, ses horreurs et ses bouleversements. Elle revoit son départ inattendu vers la France où l’entraîne une mère adoptive aux nerfs fragiles. Les voici en escale à Témara, au Maroc, ovationnant le général de Gaulle venu stimuler la 2ème DB du général Leclerc en route vers le débarquement en Normandie. Lui revient aussi son escale à Constantine, en Algérie, où la Victoire des Alliés s’achève dans des explosions de joie mais aussi de colère. Arrivée à Perpignan, Mado déplore et le froid et les regards de biais sur une Métisse chagrine qui, longtemps, a cru sa mère biologique morte.
C’est à Céret que Mado deviendra l’amie et l’égérie secrète de plusieurs artistes de renom : Picasso, Matisse, Haviland, Soutine, Chagall, Masson, Dali…
L’auteur (Babelio) :
Eugène Ébodé, né le 11 janvier 1962 à Douala au Cameroun. Il réside actuellement à Montpellier et enseigne l'écriture journalistique dans le département de lettres modernes de l'université de Nîmes. Elévé au rang de Chevalier des Arts et des Lettres en janvier 2010 par le ministre de la culture M. Frédéric Mitterrand.
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« Voici l’histoire de Mado Hammar, née en 1936 d’un père suédois et d’une mère camerounaise, à Edéa, la ville lumière ! »
1929, Gösta Hammar, suédois, rejoint son oncle à Douala, pour gérer l’exploitation forestière qu’il possède. Gösta tombe amoureux du pays, de la profession et de femmes noires, dont Monica Yaya qu’il souhaite épouser. Le fruit, Mado naîtra de ses amours. Gösta repart pour la Suède où la déclaration de guerre le retient. Avant de partir, il confie sa fille à des amis qui ne peuvent avoir d’enfant, Hélène et Jacques Boisson Là, finis les câlins, la tendresse Pour Hélène seule comptent l’éducation, l’apparence. Sur leur propriété, heureusement, il y a Dipita, domestique noir qui l’emmène sur les bords de Rivière Rouge et lui témoigne une certaine affection. Seul souvenir heureux de cette période pour Mado.
Les Boisson retournent quelques temps en France. Mado, alors qu’ils repartent au Cameroun, reste chez la grand-mère où petite fille métisse est la proie des regards au mieux curieux des gens et sa scolarité dans une école catholique n’arrange pas les choses. De protestante par son père, la voici catholique par le bon vouloir de ses « parents adoptifs ». Les années grises s’enchaînent jusqu’à sa rencontre avec Marcel, peintre, qui devient son mari et sera son grand amour..
« Le hasard a agi. Il a édifié le destin de Mado et creusé en elle des puits de colères. Il lui a aussi apporté des joies inattendues » Les carnets d’Afrique du grand-oncle Sylvander vont lui permettre de reconstituer une partie de son histoire africaine.
Mado créée l'association des amis du musée de Céret et elle y côtoie de nombreux artistes dont Picasso qui n’est absolument pas insensible aux charmes de la belle métisse. « Il darda son regard d’un noir de jais sur Mado… Elle répète souvent, en parlant de cet instant « Brûlant était le regard de Picasso » ». Elle ne fut pas sensible à ses charmes, trop éprise de Marcel. Elle est également à la base du premier Congrès des écrivains et artistes noirs
Mado est une grande dame, la dame de Céret. Sa vie est faite de résilience, de courage, de ténacité, de chagrin, d’amour. Maurice a su, par son ouverture d’esprit, la sortir du carcan où l’avait mis ses parents adoptifs et l’école catholique. Elle se révèle et se mue en une jeune femme intelligente, ouverte aux autres, à l’art, belle (Picasso la compare à Joséphine Baker)
Eugène Ebodé raconte l’histoire de Mado sans tenir compte de la chronologie, les souvenirs amènent à une époque, la découverte des papiers de son grand-oncle lui font faire des allers et retours. Je visite le XXème siècle, le temps des colonies, la seconde guerre mondiale, Céret et tous les peintres et artistes qui s’y côtoient ; elle retrouve même sa mère qu’elle croyait, plutôt qu’on lui avait fait croire, morte.
J’ai beaucoup apprécié l’ écriture de l’auteur, fine, fluide, poétique,chaque mot est pesé, la musicalité me plaît.
Mado Petrash vit toujours et Eugène Ebodé lui rend un bel hommage