Hubert Mingarelli - Un repas en hiver
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4ème de couverture :
Dans ce nouveau roman, Hubert Mingarelli met en scène des soldats d’une compagnie isolée en Pologne, dont la mission est impossible. Soit ils participent chaque jour aux exécutions sommaires, soit ils sont envoyés dans la campagne alentour pour en ramener « un », c’est-à-dire un Juif, qu’ils devront ensuite livrer à leur supérieur et donc à la mort.
Trois hommes, las des fusillades, prennent la route un matin, et avancent péniblement dans la neige, le ventre vide et les pensées tournées vers leur vie civile, sans autre choix que de prendre part à une chasse à l’homme à laquelle ils ne croient pas.
Ce jour-là, ils débusquent presque malgré eux un Juif caché dans la forêt et, soucieux de se nourrir et de retarder leur retour au camp, ils vont procéder dans une maison abandonnée à la laborieuse préparation d’un repas avec le peu de vivres dont ils disposent. Les hommes doivent trouver de quoi faire du feu et réussir à porter à ébullition une casserole d’eau. Ils en viennent à brûler le banc sur lequel ils sont assis, ainsi que la porte derrière laquelle ils ont isolé le Juif. Le tour de force d’Hubert Mingarelli constitue à mettre autour d’une table trois soldats allemands, un jeune Juif et un Polonais de passage dont l’antisémitisme affiché va, contre toute attente, réveiller chez les soldats un sentiment de fraternité vis-à-vis de leur proie.
Se posent alors des questions monstrueuses : Faut-il proposer au Juif de manger ? Et, une fois le repas partagé, faut-il le ramener ou le libérer ?
C’est ici qu’Hubert Mingarelli, dans son style sobre et précis, met le lecteur face à sa conscience et la logique meurtrière à laquelle sont soumis ces hommes. En convoquant la peur, la raison, l’espoir, la folie et l’humanité contenus en chacun d’entre nous.
L’auteur (site de la maison d’édition) :
Hubert Mingarelli est l’auteur d’une œuvre très remarquée et largement traduite. Il a publié une douzaine de romans et recueils de nouvelles dont Quatre soldats (Seuil), prix Médicis 2003. Son dernier roman, L’homme qui avait soif, a paru chez Stock en 2014 et a reçu les prix Landernau et Louis Guilloux.
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Nous sommes en Pologne pendant la seconde guerre mondiale. Les troufions sont réunis dans la cour, le lieutenant Graaf, un peu sadique, leur annonce une prochaine livraison. Trois soldats allemands n’ont pas envie de s’attaquer à cette livraison. Je comprends qu’il s’agit de juifs qu’ils vont devoir exécuter, et, tout allemand qu’ils sont, ils répugnent à ces exécutions.
Passant outre leur lieutenant, ils vont demander à aller à la chasse à) l’allemand dans la campagne polonaise, autour du camp.
C’est l’hiver, beaucoup de neige et le froid, mais nos trois soldats sont heureux d’échapper à l’exécution.
L’œil aguerri d’Emmerich découvre la cachette d’un homme dans une sorte de tanière, simplement parce qu’à l’endroit de la cheminée d’aération, il y avait moins de givre. Ils ont « leur juif » et, vu que la nuit tombe, ils dénichent une maison polonaise abandonnée et décide d’y passer la nuit avec leur prisonnier. Ils partagent avec le juif leurs provisions
Débute alors un huis clos augmenté d’un polonais et son chien venu chercher refuge et chaleur. La vue du prisonnier déclenche une harangue haineuse chez le polonais alors que les trois allemands le traitent avec humanité, ils partagent la même table. Ce repas pris en commun amène réflexion et doute sur ce qui va advenir, change le regard des trois soldats allemands, avec la haine du polonais comme catalyseur
Avec Un repas en hiver, Hubert Mingarelli rappelle que tous les soldats allemands ne sont pas des nazis. Ils sont enrôlés et doivent servir leur pays. Partager un repas, une gamelle, n’est pas une chose anodine et peut peut-être rappeler un autre dernier repas pris en commun (la cène).
J’ai aimé ce regard allemand-juif où l’humanité dépasse l’idéologie. Ce repas amène la réflexion et la prise de conscience, le débat, mais…
Un livre humaniste, court, concis, sobre, sans un mot de trop qui nous met en face, non pas de salauds de boches, mais d’hommes confrontés à une guerre qu’ils subissent. Le salaud antisémite, polonais, leur permet d’ouvrir la voie au doute. L’auteur, sans démonstration grandiloquente, avec une économie de mots, de paroles montre la complexité des sentiments qui secoue les soldats allemands et les traces laissées par cette rencontre.
Je découvre Hubert Mingarelli avec un livre qui laisse des traces. Très belle lecture.