Adeline dieudonné - Kérozène
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312 pages
Avril 2021
ISBN : 9782378802011
4ème de couverture :
Drôle comme une comédie, tendu comme un thriller, mordant comme un pamphlet : le retour de la patte Dieudonné !
Une station-service, une nuit d’été, dans les Ardennes. Sous la lumière crue des néons, ils sont douze à se trouver là, en compagnie d’un cheval et d’un macchabée. Juliette, la caissière, et son collègue Sébastien, marié à Mauricio. Alika, la nounou philippine, Chelly, prof de pole dance, Joseph, représentant en acariens… Il est 23h12. Dans une minute tout va basculer. Chacun d’eux va devenir le héros d’une histoire, entre lesquelles vont se tisser parfois des liens. Un livre composite pour rire et pleurer ou pleurer de rire sur nos vies contemporaines.
Comme dans son premier roman, La Vraie Vie, l’autrice campe des destins délirants, avec humour et férocité. Elle ne nous épargne rien, Adeline Dieudonné : meurtres, scènes de baise, larmes et rires. Cependant, derrière le rire et l’inventivité débordante, Kerozene interroge le sens de l’existence et fustige ce que notre époque a d’absurde.
L’autrice (site de la maison d’édition) :
Adeline Dieudonné est née en 1982, elle habite Bruxelles. Elle a remporté avec son premier roman, La Vraie Vie, un immense succès. Multi-primé, traduit dans plus de 20 langues, ce livre a notamment reçu en 2018 le prix FNAC, le prix Renaudot des lycéens, le prix Russell et le prix Filigranes en Belgique ainsi que le Grand Prix des lectrices de ELLE en 2019. Il s’est vendu à 250 000 exemplaires.
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« 23h12. Une station-service le long de l’autoroute, une nuit d’été. Si on compte le cheval mais qu’on exclut le cadavre, quatorze personnes sont présentes à cette heure précise. »
Les aires d’autoroute et leurs rencontres improbables. Ces quatorze personnages ne sont pas en quête d’auteur, ils l’on trouvé en la personne d’Adeline Dieudonné.
Je ne peux m’empêcher, lorsque, stationnée quelque part, d’inventer une histoire aux gens qui passent ou qui sont à côté, comme de regarder, le soir, les fenêtres allumées d’une maison ou d’un appartement… Je leur offre une vie que les habitants ne connaitront jamais.
En des chapitres alertes, quelques fois brut de décoffrage, Adeline Dieudonné parle des gens qui se côtoient un instant, le temps d’un arrêt à la station-service et elle restitue parfaitement cette fugacité. En effet, on ne sait pas ce que va devenir le cadavre, ni la grand-mère qui a des envies d’en terminer avec la vie. Tout s’enchevêtre et puis, tout se dénoue, me laissant sans avoir le temps de dire au revoir aux utilisateurs de la station-service. Et, pour moi, c’est le fort du roman, me laisser sur ma fin car l’instant de la rencontre est terminé et donc, de continuer l’invention de leurs vies.
Pas de faux-semblants, les mots sont les mots, les portraits sont durs, voire passés au vitriol sur des vies qu’ils imaginaient meilleures comme Chelly, prof de pole dance, accro aux réseaux sociaux et à ses « amis » qui tue son mari parce qu’elle ne supporte plus la petite vie grise, dans une maison grise, elle-même dans une rue grise. Le dépanneur, qui se fait, sur internet, des plans de drague, se fait, excusez le terme, mais c’est bien ça, une automobiliste en panne sèche et qui jouit encore plus parce que la mémé le regarde de son fauteuil roulant. « Elle avait pas l’air gênée du tout, juste qu’elle nous matais, avec quelques cheveux blancs tous fins qui flottaient sur sa tête. Elle mangeait des cerises qu’elle sortait d’un grand papier kraft posé sur ses genoux. » Le drôle de l’affaire c’est qu’elle coordonne le mouvement de ses mâchoires avec le rythme du mouvement du couple. Je n’ai pas pu empêcher un fou rire en imaginant la scène.
Beaucoup moins drôle l’historie Alika qui attend qu’on vienne la chercher. Alika vient des Philippines où elle a été recrutée pour s’occuper des enfants d’un couple, laissant ses propres enfants pour gagner l’argent qui leur permettrait de faire de meilleurs études. Oui, mais voilà,les petits étant confiés à leurs grands-parents, que faire d’Alika ? Oh, facile, « ses patrons l’ont prêtée à des amis pour les vacances ». Pourquoi faire tout un trajet, on coupe la poire en deux. On laisse Alika sur une aire d’autoroute et les patrons viennent la récupérer… Elle est pas belle la vie ! « Alika se demande si elle s’habituera un jour à être considérée comme un meuble. Ou si elle finira par en devenir un. »
Un grand écart sur les petites et grandes misères du monde ; sans aucune concession, pas de romantisme, de la vérité au vitriol.
Adeline Dieudonné nous raconte ses vies cabossées qui, l'instant d'un plein, d'une descente à la station-service, se télescopent.
Un livre que j’ai dévoré. J’apprécie cet humour froid, grinçant, dur, violent, qui ne laisse pas de place au romantisme.Un petit bijou qui confirme son précédent et premier roman qui fut un coup de cœur : La vraie vie.
Un coup de coeur