Bérengère Cournut - De pierre et d'os

De pierre et d’os

Bérengère Cournut

Editions le Tripode

219 pages

août 2019

ISBN : 9782370552129

 

4ème de couverture :

« Les Inuit sont un peuple de chasseurs nomades se déployant dans l’Arctique depuis un millier d’années. Jusqu’à très récemment, ils n’avaient d’autres ressources à leur survie que les animaux qu’ils chassaient, les pierres laissées libres par la terre gelée, les plantes et les baies poussant au soleil de minuit. Ils partagent leur territoire immense avec nombre d’animaux plus ou moins migrateurs, mais aussi avec les esprits et les éléments. L’eau sous toutes ses formes est leur univers constant, le vent entre dans leurs oreilles et ressort de leurs gorges en souffles rauques. Pour toutes les occasions, ils ont des chants, qu’accompagne parfois le battement des tambours chamaniques. » (note liminaire du roman)

Dans ce monde des confins, une nuit, une fracture de la banquise sépare une jeune femme inuit de sa famille. Uqsuralik se voit livrée à elle-même, plongée dans la pénombre et le froid polaire. Elle n’a d’autre solution pour survivre que d’avancer, trouver un refuge. Commence ainsi pour elle, dans des conditions extrêmes, le chemin d’une quête qui, au-delà des vastitudes de l’espace arctique, va lui révéler son monde intérieur.

Deux ans après son roman Née contente à Oraibi, qui nous faisait découvrir la culture des indiens hopis, Bérengère Cournut poursuit sa recherche d’une vision alternative du monde avec un roman qui nous amène cette fois-ci dans le monde inuit. Empreint à la fois de douceur, d’écologie et de spiritualité, De pierre et d’os nous plonge dans le destin solaire d’une jeune femme eskimo.

Édition augmentée d'un cahier de photographies.

De pierre et d'os a reçu le prix du roman Fnac 2019.

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La lumière faible et bleutée qui tombe du ciel révèle sous moi un liquide sombre et visqueux… Penchée sur la flaque, je n’ai pas entendu le grondement au loin. Lorsque je sens la vibration de mes jambes, il est trop tard, la banquise est en train de se fendre à quelques pas de moi. L’igloo est de l’autre côté de la faille, ainsi que le traîneau et les chiens. Je pourrais crier, mais je ne le fais pas. »

Par les caprices météorologiques, cet instant où la banquise est plus fragile, parce qu’elle est sortie de l’igloo pour découvrir ses premières règles, la gamine se retrouve séparée de sa famille, seule avec cinq chiens dont la fidèle Ikasuk. Son père a juste le temps de lui envoyer une peau roulée et un harpon qui se casse à réception et, surtout, une amulette. « Un silence lugubre envahit mes oreille et me raidit la nuque ». Imaginez votre enfant devant se débrouiller seul !

Et là, pas question de se laisser aller car, la mort esdtau bout. La voici responsable de sa vie et de celle de la meute, petit inuit perdue dans l’immensité de la glace.

Faille géographique, faille intime, faille familiale, faille spatio-temporelle c’est ce qu’offre le dernier live de Bérengère Cournut.

Pas question de se laisser aller. « … J’ai dû m'assoupir quelques instants en regardant le ciel, le museau d’Ikasuk contre ma jambe me réveille en sursaut. Il ne faut pas dormir. » Uqsuralik, c’est le prénom de la jeune naufragée, va faire corps avec la nature, chercher à se rapprocher d’une autre famille inuit, surtout ne pas rester seule. Dans les tribus de rencontre, elle trouve accueil, détestation, jalousie, amour, la mort de son jeune époux, la naissance de son enfant, la vie rude des inuits est son lot.

« Je m’aperçois à quel point je suis seule. Ma survie ne tient plus à grand-chose. Je suis trop jeune pour avoir déjà rencontré un esprit capable de me sauver. Couchée contre moi, Ikasuk est ma seule protection contre la mort -et ce n’est qu’un chien ».

Uqsuralik, grâce à son père, aux dures conditions de vie, sait construire un igloo, chasser le phoque. et autres petits animaux et poissons, connaît les baies comestibles, découper un animal. Tout ceci lui permet de survivre et de n’être pas un poids mort pour les tribus qu l’accueillent. Les esprits sont autour de la jeune fille, l’aident ou la repoussent, jusqu’au moment où, grâce à « l’homme lumière » elle se rend compte qu’elle est chamane.

«L’aube verte a touché le sol et s’est transformée en homme. Il était grand, couvert d’un large capuchon qui me cachait son visage. Il a marché vers moi et, en arrivant sur les ruines de mon abri, il s’est mis à sauter. Les vibrations dans le sol me donnaient l’impression qu’il tassait mes jambes dans la pierre, que je ne pourrais plus jamais en sortir.»

Bérengère Cournut, comme avec « Née contente à Oraibi » me transporte, me ravit par un texte où l’on ne sent pas le poids du travail de recherches fourni pour ce dernier livre, tant l’écriture est belle, douce, imagée, ponctuée de chansons, ode à la vie.

Un livre au rythme de la nature, de la vie, des rites inuits, des chansons et mythes. Surtout ne pas tuer un animal terrestre après avoir tué un animal marin et, surtout, les remercier de s’être laissés prendre et ainsi nourrir la tribu. Les esprits se cachent sous les pierres. Les bébés, à leur naissance, prennent le nom de celui qui vient de mourir et ainsi, le mort se réincarne dans une nouvelle vie. Les chants ponctuent la vie des inuits comme ils jalonnent le livre

Cette fois, je bénis les dieux inuits, les esprits pour cette superbe lecture et coup de cœur qui plusieurs semaines après, perdure.

Merci Le Tripode d’éditer une telle autrice.

 

 

 

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A
Tu as raison, une lecture et des personnages qui restent en mémoire longtemps.
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Z
Tout comme "Née contente à Oraibi"
A
J'ai l'intention de le lire, je l'ai vu à la bibliothèque, mais il faudra qu'il attende son tour ..
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Z
J'espère que tu seras aussi émerveillée que moi
M
Un auteur que je n'ai pas encore lu mais qui grâce à toi est dans mon petit carnet. Je compte bien découvrir un de ses romans bientôt. Merci de cette présentation, je n'ai lu que des critiques positives de ce dernier titre...
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Z
Superbe
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