Jeanne Benameur - Ceux qui partent

Ceux qui partent

Jeanne Benameur

Editions Actes Sud

Août 2019

336 pages

ISBN 9782330124328

 

4ème de couverture :

Tout ce que l’exil fissure peut ouvrir de nouveaux chemins. En cette année 1910, sur Ellis Island, aux portes de New York, ils sont une poignée à l’éprouver, chacun au creux de sa langue encore, comme dans le premier vêtement du monde.

Il y a Donato et sa fille Emilia, les lettrés italiens, Gabor, l’homme qui veut fuir son clan, Esther, l’Arménienne épargnée qui rêve d’inventer les nouvelles tenues des libres Américaines.

Retenus un jour et une nuit sur Ellis Island, les voilà confrontés à l’épreuve de l’attente. Ensemble. Leurs routes se mêlent, se dénouent ou se lient. Mais tout dans ce temps sus pendu prend une intensité qui marquera leur vie entière.

Face à eux, Andrew Jónsson, New-Yorkais, père islandais, mère fière d’une ascendance qui remonte aux premiers pionniers. Dans l’objectif de son appareil, ce jeune photographe amateur tente de capter ce qui lui échappe depuis toujours, ce qui le relierait à ses ancêtres, émigrants eux aussi. Quelque chose que sa famille riche et oublieuse n’aborde jamais.

Avec lui, la ville-monde cosmopolite et ouverte à tous les progrès de ce XXe siècle qui débute.

L’exil comme l’accueil exigent de la vaillance. Ceux qui partent et ceux de New York n’en manquent pas. À chacun dans cette ronde nocturne, ce tourbillon d’énergies et de sensualité, de tenter de trouver la forme de son exil, d’inventer dans son propre corps les fondations de son nouveau pays. Et si la nuit était une langue, la seule langue universelle ?

L’autrice (site de l’éditeur) :

Entre le roman et la poésie, le travail de Jeanne Benameur se déploie et s'inscrit dans un rapport au monde et à l'être humain épris de liberté et de justesse.

Une œuvre essentiellement publiée chez Actes sud pour les romans. Dernièrement : Profanes (2013, grand prix du Roman RTL/Lire), Otages intimes (2015, prix Version Femina 2015, prix Libraires en Seine 2016) ou L'enfant qui (2017).

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Ouvrir un roman de Jeanne Benameur est toujours une promesse tenue d’un excellent livre.

« Ils prennent la pose, père et fille, sur le pont du grand paquebot qui vient d’accoster. Tout autour d’eux, une agitation fébrile. On rassemble sacs, ballots, valises. Toutes les vies empaquetées dans si peu. »

1910. Eux, ce sont Donato et Emilia, venus d’Italie, non pas pour un avenir meilleur, mais pour changer de vie. Donato, acteur italien, est veuf depuis peu, inconsolable. Emilia a pris la décision pour eux deux ; direction l’Amérique où elle veut être peintre et… LIBRE.

C’est vrai qu’ils détonnent quelque peu dans la foule fébrile, anxieuse des candidats à l’émigration. Lui grande stature, se tient droit avec un livre rouge qui ne le quitte jamais et qu’il lit souvent « Enée », sa bible.

Tout un troupeau humain qui attend le bon vouloir d’un tampon leur permettant d’espérer une vie meilleure. Parmi eux, Emilia a remarqué Esther, Jeune femme venant d’Arménie, seule survivante du génocide. « L’histoire d’Esther Agakian, n’est pas racontable, mais elle est devenue la moelle de ses os. » L’entente est immédiat entre elles, même si elles ne parlent pas la même langue, leurs corps, leurs mains se parlent et se comprennent. Un peu plus tard, le son d’un violon se fait entendre. Gabor joue pour Emilia qu’il a remarqué et les notes de musique lui font un manteau de sensualité. Envoûtée, Emilia danse et d’un geste naturel, dénoue ses longs cheveux.

Andrew Jónsson, aime venir photographier tous ces inconnus venus dans l’espoir d’une vie meilleure. Il vient à la recherche, à la source de ses racines. Son père est venu d’Islande rejoindre le père parti depuis deux ans et sa mère se glorifie d’être la descendante des passagers du Mayflower. Le sujet n’est jamais abordé dans la grande et belle maison, alors, Andrew se faufile dans les couloirs d’Ellis Island pour chercher un signe, chercher son passé et il s’est attaché à Donato et Emilia.

Cette nuit-là, la peur, l’espoir, l’attente, tout part du ventre, des tripes, rien n’est pensé ni intellectualisé. Ils sont là, couchés dans des lits, hommes et femmes dans des dortoirs séparés. Cette nuit, ils accouchent d’une nouvelle vie. Cette nuit, certains osent, d’autres dorment, Donato, de sa belle voix, lit des passages de son Enée. Cette nuit, la chrysalide se transforme (peut-être) en papillon, comme les serpents, ces femmes et ses hommes vont muer

Leur langue maternelle va devenir une langue étrangère, une langue intime.

« La belle langue c’est ce qui les a toujours tenus ensemble, tous les trois, puis tous les deux. Le lien indéfectible, sacré. Est-ce que cela aussi va se fissurer ? » Il faudra bien parler une autre langue, toujours une autre. »

Un superbe livre intense comme leurs vies ; une plume sensuelle, imagée comme une peinture, peut-être celle d’Emilia. Une très belle retrouvaille avec Jeanne Benameur.

 

 

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E
une autrice que j'aime bcp et celui là est très très bien!
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Z
J'ai aimé ta chronique concise où tout y est
Z
Je confirme, un coup de coeur. J'aime son univers
S
C'est une autrice que j'apprécie beaucoup également. Ce livre fait partie de ceux qui me font de l'oeil dans cette rentrée.
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Z
Alors, laisse-toi aller et achète-le
A
Je ne suis pas tout à fait d'accord avec toi : je n'ai pas aimé tous les livres de cette auteure. Mais celui-ci fait partie de ceux que j'ai aimé.
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Z
Il y en a qui ne sont pas des coups de coeur, mais bien
A
Je n'ai pas lu l'auteure depuis un bon moment ; je pourrais renouer avec celui-ci. L'histoire d'Ellis Island me fascine.
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Z
J'aime son univers très humain
M
Voilà un livre dont le succès se répand sur la toile. Je le croise toujours avec de bonnes critiques. A livre à retenir donc !
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Z
OH OUI
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