Frank Harris - Pertes et profits
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Frank Harris
Traduit de l'anglais par Henry-D. Davray
Novembre 2017
92 pages
ISBN : 978-2-918619-39-0
4ème de couverture :
À Kansas City, en cette fin de 19e siècle, tout le monde connaît le grand magasin Boulger, dont le fronton arbore fièrement le nom de son propriétaire. Pourtant, chaque jour la concurrence se fait plus rude et, quand survient un ralentissement des affaires, la faillite menace l’entreprise jusqu’ici prospère. Que faire pour éviter la ruine ? Et si, par un malheureux coup du sort, le magasin était ravagé par le feu ? Il suffirait alors d’empocher les primes d’assurance avant de repartir sur de nouvelles bases avec un bon pactole en poche. Mais pour cela, Boulger a besoin d’un complice. Or, qui mieux que le jeune Tryon, cet employé avide de réussite, calculateur et amoureux de la fille du patron, pourrait se charger de la basse besogne ? Cependant, lorsque le plan mûrement réfléchi est enfin mis à exécution, les événements vont prendre une tournure pour le moins inattendue.
Avec une ironie mordante, Frank Harris dresse le portrait implacable de deux hommes, l’un vaniteux, l’autre ambitieux, prêts à tout pour arriver à leurs fins, et d’une société prompte à célébrer des héros là où il n’y a que des hommes ordinaires motivés par leurs intérêts.
L’auteur (site de l’éditeur) :
Journaliste et écrivain, Frank Harris (1856-1931) est notamment l’auteur de La Bombe (prix Mémorable 2015 des librairies Initiales).
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Kansas City, dix-neuvième siècle. La soif de grandir, les self-made men, le pays de toutes les possibilités… Les villes s’agrandissent, les commerces fleurissent
Monsieur Boulger, est le patron d’un grand magasin de tissus, un des premiers à s’être installé et gère son magasin de façon pépère. Oui, mais voilà, la concurrence fait rage et les nouveaux magasins attirent le chaland parce que Boulger n’a pas su saisir le train en marche, la mode change, et les chiffres sont de plus en plus mauvais. Cela marchait bien, alors pourquoi changer. Et puis, madame a un train de vie à assumer.
Pourtant ce n’est pas faute de l’avoir prévenu, surtout le jeune David Tryon ; les chiffres qu’il donne à son patron sont mauvais, de plus en plus mauvais.
David Tryon est un self made man. Il est entré en bas de l’échelle dans le magasin pour en grimper les barreaux grâce à son travail, son assiduité, sa volonté… bref, un travailleur acharné. C’est bien simple, il est encore au boulot à dix heures du soir.
Tryon lui propose des solutions comme les soldes pour éponger le stock énorme, mais le boss ne veut rien entendre c’est qu’il a sa petite idée le bougre, une idée radicale ; incendier son magasin. Mais bon, on est le patron ou pas… Il ne va pas se salir le revers de la veste et puis, il vaut mieux qu’il ne soit pas là, des fois que, les assurances et leurs enquêtes…. Un petit peu couard le patron à moins que ce ne soit son statut qui l’empêche de se pencher sur les propositions honnêtes de Tryon.
Toujours est-il que, malgré une éducation rigide, son honnête, sa conscience, qui sait qui va s’y coller ?... Tryon bien sûr. Comment l’appâte-t-il ? En lui faisant miroiter un mariage avec sa fille dont il connait l’inclinaison pour David et vice-versa, une position sociale, un intéressement. Il sait y faire le patron, se disant que tout peut changer…
Sérieux et besogneux, Tryon choisit son temps et son heure sans en parler à personne, même pas à sa mère. Tout est prévu, le feu prend, Tryon est au café devant une bière et là, le hic, l’imprévu, le non-envisagé se produit. Le grain de sable noir qui fera de Tryon un héros, mais il faudra qu’il vive toute le restant de sa vie avec ça, sans jamais pouvoir en parler. Une punition non pas divine, mais terrible.
Frank Harris, tout au long de ce court roman ou nouvelle, manie l’ironie avec classe et délectation pour mon plus grand plaisir. Pas ou plutôt, plus de morale. Le patron est dédommagé par les compagnies d’assurances, l’employé » paiera toute sa vie durant. Le gros mange le petit, le petit subit, même s’il épouse la fille. Il passera sa vie en compagnie de ce beau-père qui a barre sur lui car, après tout, il n’y a rien d’écrit, la demande de foutre le feu est orale, rien, Tryon est doublement prisonnier. Voilà la morale de l’histoire : le gros mange toujours le petit.
La fin du livre « Un héros ? Si tous les héros avaient été comme… » est cynique, au lecteur de continuer… Ou pas.
Un petit livre qui se lit d’une traite, court, mais qui en dit long.
Belle découverte chez « La dernière goutte »