Cyril Dion - Imago
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Imago
Cyril Dion
Août 2017
224 pages
ISBN 9782330081744
4ème de couverture :
Parce que son frère s’apprête à commettre en France l’irréparable, Nadr le pacifiste se lance à sa poursuite, quitte la Palestine, franchit les tunnels, passe en Égypte, débarque à Marseille puis suit la trace de Khalil jusqu’à Paris. Se révolter, s’interposer : deux manières d’affronter le même obstacle, se libérer de tout enfermement, accéder à soi-même, entrer en résilience contre le sentiment d’immobilité, d’incarcération, d’irrémédiable injustice.
Sous couvert de fiction, ce premier roman est celui d’un homme engagé pour un autre monde, une autre société – un engagement qui passe ici par l’imaginaire pour approcher encore davantage l’une des tragédies les plus durables du XXe siècle.
L’auteur (site de l’éditeur) :
Né en 1978, Cyril Dion est le cofondateur avec Pierre Rabhi du mouvement Colibris. Également cofondateur de la revue Kaizen, il publie son premier recueil de poèmes, Assis sur le fil, en 2014 aux éditions de La Table ronde. En 2015, il écrit et coréalise avec Mélanie Laurent le film Demain, qui obtient le César du meilleur documentaire en 2016.
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Le décor ? Le conflit entre la Palestine et l’Israël
Les protagonistes ? Quatre personnages enfermés dans leur histoire personnelle.
En France :
Amandine la soixantaine retirée à la campagne, mais pour oublier quoi ?
Fernando, rouage important ou pas du Fonds, genre FMI qui étudie, sur dossiers, les subventions accordées aux pays demandeurs. Il vit enfermé dans sa tour vitrée, sa tour d’ivoire, vit enfermé en lui, refuse tout contact direct avec les représentants de ces pays, totalement déconnecté de la réalité. Sa vision sera remise en cause par un départ sur le terrain palestinien. « Une part de lui-même s’accrochait à cet ancien Fernando Clerc qui avait pouvoir de vie ou de mort sur ces pauvres types. Qui pouvait choisir, à l’abri de son bureau gris, combien de fonds seraient octroyés à leur survie et de quelle façon. »
En Palestine :
Nadr, le poète, le fumeur de joints, le pacifique qui voit dans la religion autre chose que ce que les barbus proposent et son frère Khalil qui choisit le camp du Hamas, de la violence ; Deux visions palestiniennes du conflit
Le désespoir pousse les jeunes palestiniens à exporter leur colère en posant des bombes. C’est ce que fait Khalil parti à Paris. Nadr, toujours persuadé qu’il peut sauver son frère, le suit à Paris où il espère qu’une petite voix lui dira, elle, c’est ta mère.
L’auteur joue du contraste entre la réalité que vivent Nadr et Khalil et l’abstraction des chiffres avec lesquels Fernando jouent, pardon, sur lesquels il travaille. Cette barrière est la colonne vertébrale de Fernando qui ploie lorsqu’il est confronté à la réalité du conflit.
Qu’ont-ils de commun ? Hormis leur solitude, leur enfermement, prisonnier de son parcours ? Je le saurai au fil des pages.
Cyril Dion nous conduit, par le chemin de leurs pensées, de leurs actions mais pas de leurs omissions (oui, je sais très mauvais jeu de mots) vers leurs destins, l’accomplissement de leurs vies, comme la chrysalide quitte son habit pour devenir un imago et… mourir.
L’histoire débute par deux pages poignantes, qui paraissent totalement hors sujet, mais…
Cyril Dion amène beaucoup de réflexions, de questions, une fois le livre refermé. La discussion n’est pas close avec de telles phrases qui résonnent en soi.
« Dans le cœur des plus petits grandissait la haine instillée par la souffrance des plus grands. »
« Chacun de nous vit avec sa propre prison, plus ou moins large. Et fait ce qu’il peut pour en sortir… »
« Pour la première fois, il ressentait la Palestine comme un fardeau ».
« A partir d’un certain degré de pouvoir, les gens ne réfléchissent plus normalement. Vous avez déjà remarqué cela ? Ils cessent de se comporter comme des êtres humains. Ils ne voient plus les enfants mourir, la bonne terre être emportée par la crue, les innocents se faire parquer comme des rats dans de minuscules territoires entourés de soldats et de barbelés. Ils voient des intérêts. Des conflits d’intérêts. Des raisons d’Etat. »
Un livre, servi par une écriture percutante, intense, forte qui touche du doigt, par la fiction, une réalité brutale, le conflit israélo-palestinien. Une belle trouvaille des 68 premières fois.

