Margaret Atwood - C'est le coeur qui lâche en dernier
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C’est le cœur qui lâche en dernier
Margaret Atwood
Traduction Michèle Albaret-Maatsch
Août 2017
450 pages
ISBN : 2-221-19209-5
4ème de couverture :
Le nouveau chef-d’œuvre de Margaret Atwood, l'auteure de La Servante écarlate.
Stan et Charmaine ont été touchés de plein fouet par la crise économique qui consume les États-Unis. Tous deux survivent grâce aux maigres pourboires que gagne Charmaine dans un bar sordide et se voient contraints de loger dans leur voiture... Aussi, lorsqu'ils découvrent à la télévision une publicité pour une ville qui leur promet un toit au-dessus de leurs têtes, ils signent sans réfléchir : ils n'ont plus rien à perdre.
À Consilience, chacun a un travail, avec la satisfaction d'œuvrer pour la communauté, et une maison. Un mois sur deux. Le reste du temps, les habitants le passent en prison... ou ils sont également logés et nourris ! Le bonheur. Mais le système veut que pendant leur absence, un autre couple s'installe chez eux avant d'être incarcéré à son tour. Et Stan tombe bientôt sur un mot qui va le rendre fou de désir pour celle qui se glisse entre ses draps quand lui n'y est pas : « Je suis affamée de toi. »
Avec C'est le cœur qui lâche en dernier, Margaret Atwood nous livre un roman aussi hilarant qu'inquiétant, une implacable satire de nos vices et travers qui nous enferment dans de viles obsessions quand le monde entier est en passe de disparaître.
L’auteur (site de l’éditeur)
Margaret Atwood, née à Ottawa en 1939, est l'auteure d'une quarantaine de livres – fiction, poésie et essais critiques. Traduite dans cinquante langues, elle est l'une des plus grandes romancières de notre temps. Aux Éditions Robert Laffont, dans la collection « Pavillons », ont été notamment publiés : C'est le cœur qui lâche en dernier (2017), MaddAddam (2014), Le Temps du déluge (2012), La Servante écarlate (2005), Le Dernier Homme (2005), Le Tueur aveugle (2002, Booker Prize) ou Captive (1998).
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Charmaine et Stan jeunes mariés, avaient la vie devant eux, chacun un bon boulot, une maison à crédit, de quoi voir l’avenir peut-être pas en rose, mais certainement pas en noir. Pourtant, suite à la crise qui sévit aux USA, Stan est sans boulot et Charmaine vivote dans son boulot de serveuse dans un bar minable, le PixelDust. Ayant tout perdu, ils vivent et dorment dans leur petit Honda, lui devant pour le cas où il faudrait démarrer en trombe en cas d’attaque, et elle derrière. En désespoir de cause et parce qu’ils n’ont plus rien à quoi se raccrocher, ils saisissent l’opportunité offerte par un projet nommé Positron, largement promu par des publicités télé. Ce projet est une cité voulue idéale, où les citoyens vivent en alternance dans une ville et dans une prison : « Et si chaque citoyen se trouvait être soit gardien, soit prisonnier, le résultat se traduirait par le plein-emploi : pendant qu’une moitié serait en prison, l’autre moitié aurait à garder les prisonniers d’une manière ou d’une autre. Ou bien à garder ceux qui les avaient gardés. »
« Enfin une vision ! Pourquoi ne pas essayer, puisque rien d’autre n’a marché ? »
Alors, Charmaine et Stan signent, ils la veulent cette vie digne de ce nom. Ed, le présentateur du programme est très persuasif. Si c’était l’aube d’un mauvais jour, ou pas ?
Pour une meilleure optimisation de l’espace, deux couples se partagent la même maison. Un couple en prison, le second dans la maison. Ce ne sont plus des occupants, mais des Alternants, fallait y penser ! Un mois à Positron, la prison, un moi à Consilience, leur « chez eux ». En prison, Stan s’occupe du poulailler industriel et Charmaine est « Chef de l’administration des thérapeutiques ». J’apprends ce que ce titre ronflant signifie… ça fait froid dans le dos. Chacun vaque à ses occupations, Ils vivent bien jusqu’à ce billet trouvé dans la cuisine : « Je suis affamée de toi - Jasmine » Stan fantasme sur ce billet et… tout dérape, tout part en quenouille, devient vaudevillesque. Adieu la petite vie tranquille, réglée comme du papier à musique.
Margaret Atwood a le chic pour instiller le doute, me conduire là où je n’attends pas les personnages. Au-delà du vaudeville, se pose la question de la noirceur de l’âme humaine, des calculs, du profit, du désir, du besoin de dominer. « La soif de dominer est celle qui s’éteint la dernière dans le cœur des hommes » selon Machiavel donc… juste avant que le cœur ne lâche.
Un livre très bien construit. Le découpage, entre gros chapitres et sous-chapitres courts, permet une montée en puissance d’une intrigue qui fait froid dans le dos. Les situations peuvent être drôles, cyniques, sombres, avec plusieurs façons de voir le cœur lâcher en dernier.
Un livre que je n’aurais sans doute jamais lu sans les ExploLecteurs. Il a fallu que je fasse des pauses pour réaliser que cela pourrait devenir réalité et non de la science fiction et cela m’a fichu la trouille. Les « maisons séniors » où sont parqués, pour leur bien-être bien évidemment, les gens d’un certain âge et pas forcément d’un âge certain fleurissent. Nous sommes pistés via téléphones portables, ordinateurs, GPS… Allez, un petit fou dérangé et nous vivrons Positron. Est-ce là le rôle de la science fiction que de nous faire réfléchir à notre façon de vivre ?