Jean-Marie Blas de Roblès - La Montagne de minuit
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La Montagne de minuit
Jean-Marie Blas de Roblès
Editions Zulma
2010
ISBN : 2843045207
4ème de couverture :
Au cœur de ce roman, un personnage hors du commun : Bastien, gardien d'un lycée jésuite et secrètement passionné par tout ce qui concerne le Tibet et le lamaïsme. Tenu à l'écart de son voisinage pour d'obscurs motifs, le vieil homme vit plus solitaire qu'un moine bouddhiste.
L'aventure commence à Lyon, par la rencontre entre le vieux sage et Rose, nouvellement emménagée avec son petit Paul. Séduite par l'étrangeté du personnage, cette dernière s'attache à lui au point de lui permettre d'accomplir le voyage de sa vie...
Vérités et mensonges, fautes et rédemption s'enlacent et se provoquent dans ce roman qui interroge avec une désinvolture calculée les « machines à déraisonner » de l'Histoire contemporaine. Roman à thèse si l'on veut, sous les bonheurs du romanesque pur, la Montagne de minuit se lit comme une exploration intrépide des savoirs et des illusions.
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J’ai quelque peu peiné à faire cette chronique. Ce livre ne me lâche pas.
LUI : Bastien Lhermine gardien d’un lycée tenu par des jésuites se voit signifier sa mise à la retraite d’office avec perte de son logement de fonction. Bien sûr, il a dépassé l’âge de la retraite, mais ce traitement n’est pas digne, à mon avis, d’un homme d’une église qui prône le pardon et la bonté…
ELLE : Rose Sévère ; Son nom résonne comme un oxymore. Elle est historienne et mère célibataire.
ILS sont voisins et des liens d’amitié vont se tisser entre eux. Rose et Bastien partiront ensemble pour le Potala cher à Bastien.
Dans ce livre beaucoup de paires. Bastien et Rose, Rose et Paul son fils, Bastien et le collège, Bastien et Tom, Rose et Tom, Bastien et Rose, Tom et Bastien.
Bastien, arrivé sur le toit du Monde a un malaise et se retrouve, dans le coma, à l’hôpital du Peuple. Savait-il ? Qu’a-t-il dit au moine pour accéder à ce lieu fermé ? Le moinillon qui marmonne des prières accroupi aux pieds du vieil homme puis qui continue ses litanies une fois Bastien à terre me le font penser.
Toujours dans le coma, juste avant son rapatriement sanitaire, Rose osera lui dévoiler le terrible secret qui la ronge. Dans l’avion, Bastien lui révèlera avoir tout entendu et lui fera aussi ses confidences (fausses ou vraies, nous le saurons plus tard ?). Cette prise en charge du secret de l’autre agira comme une béquille pour Rose et sera le chant du cygne de Bastien. Le cercle infernal de la faute, de la culpabilité sera ainsi brisé.
Une autre lecture intervient car Paul, écrivain, raconte l’histoire et Rose confirme et ou commente.
Arrive la fin de cette jolie histoire avec ce paragraphe « Nouvelles pièces à verser au dossier des brigades. J’ai essayé d’être claire et didactique. J’espère que tu en feras bon usage ». Rose, suite aux révélations de Bastien a cherché les preuves de ces « brigades tibétaines » sur Internet, ce que j’ai fait aussi sans tout comprendre de ce « salmigondis » (mot de Rose) ce ramassis d’histoires à dormir debout. « Aujourd'hui, je suis presque sûre qu'il avait prévu les questions qui soulèveraient ces fichues brigades, qu'il m'a ainsi obligée au parcours de démystification dont je viens de te rendre compte ».
La, le livre prend une tout autre dimension et n’arrête de me tarauder. Qu’il y a-t-il de vrai dans ces pages en fin du livre ? Vérité ou mystification ? Pourquoi ?
C’est un livre très maîtrisé, à plusieurs lectures entrelacées comme une tresse. Au début, j’étais avec un bon livre sur l’amitié, le secret ; un livre fort bien écrit et original (on peut en rester à ce stade sans problème)…. Puis me voici avec un sujet de réflexion sur la vérité ou la fiction, sur les secrets et leurs révélations, sur Hitler, le 3ème Reich et ses accointances vraies ou supposées avec le Dalaï-lama… Les pièces jointes font peur… Je pense qu’il faudra que je le relise.
Maintenant, je vais dénicher « Là où les tigres sont chez eux », j’espère venir à bout de ce gros pavé.
Quelques extraits :
Depuis que les hommes ne croient plus en Dieu, ce n’est pas qu’ils ne croient plus en rien, c’est qu’ils sont prêts à croire en tout…
S’il y a quelque chose de pire que la religion, c’est le mythe ; la littérature est bien incapable de changer le monde, mais dis-toi qu’elle a encore les moyens d’entretenir ce qui le désagrège.
Un enfant attend tout d'un conte, sauf la réalité. Des histoires d'ogres, de sorcières, de petites filles dévorées par les loups, peu importe pourvu qu'on le détourne de ses propres angoisses. Une mère qui cherche à apaiser son enfant ne se préoccupe pas du degré de vérité de ce qu'elle invente ; elle met en scène les seuls éléments qui permettent de croire son histoire, de se laisser emporter.
Regarde Dan Brown et son Da Vinci Code. Je me fiche que ce type écrive mal ou raconte des conneries, la seule chose que je lui reproche c’est de commencer son livre en disant : « attention, tout ce que vous allez lire est la stricte vérité, je n’ai rien inventé », alors qu’ensuite il te raconte le Petit Chaperon rouge.
-Alors, j’écris « ceci est un conte », et je fais ce que je veux ?
-Juste une question de conscience personnelle. Quoi que tu dises, de toute façon, cela n’empêchera pas les gens de croire dur comme fer à leurs fantômes préférés. Y compris à l’existence des Brigades tibétaines…
Un vrai pour un faux, ça donne toujours du vraisemblable
Mener à bien une résolution, ne serait-ce qu'une seule, c'est se rapprocher de l'état de grâce.